Le quatrième mur
D’abord une histoire d’amitié, entre Samuel Akounis, réfugié politique grec qui a été torturé pour son opposition au régime de Papadopoulos, et Georges, le narrateur, activiste de gauche dans les années 1970. Une amitié faite d’admiration, de partage des valeurs de gauche et humanitaires, de camaraderie, et enrichie par un amour commun du théâtre. Tous deux sont metteurs en scène.
Le livre prend son tournant vers la tragédie lorsque Samuel, trop malade, demande à Georges de le remplacer pour mener à bien le projet de sa vie : « monter l’Antigone de Jean Anouilh à Beyrouth. Voler deux heures à la guerre, en prélevant dans chaque camp un fils ou un fille pour en faire des acteurs. Puis rassembler ces ennemis sur une scène… »
Geste de paix, de bonne volonté, goutte d’eau dans la mer…
Et Georges a dit oui. Il est allé à Beyrouth, en 1982, au cœur de la guerre civile libanaise, et en particulier au moment du massacre de Sabra et Chatila.
Un livre coup de poing, qui rappelle l’époque de la guerre du Liban, un peu oubliée chez nous, mais qui a dû laisser de terribles traces chez ceux qui l’ont vécue. L’auteur ne prend pas position par rapport aux différentes factions, Georges se fait des amis, presque des frères, dans tous les « camps ». Ce récit tragique, mais pas voyeuriste, provoque un élan de compassion pour ce pays martyrisé où tous les partis semblent victimes et bourreaux. Il donne envie de se documenter sur le Liban, et de relire l’Antigone d’Anouilh.
L'auteur semble s'intéresser particulièrement aux guerres civiles, et aux combats de gauche. Il nous avait déjà persuadés avec son roman retour à Killybegs, situé, lui du côté des conflits en Irlande.
Le quatrième mur
Sorj Chalandon
Grasset, août 2013, 325 p., 19€
Du même auteur, lire aussi Retour à Killybegs,