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Coups de coeur - Page 10

  • Jean Christophe Rufin (4) Les causes perdues

    Causes perdues.gifLes causes perdues
    Jean-Christophe RUFIN
    Gallimard, 1999
    Prix Interallié

    Le roman se présente comme le journal d’Hilarion Grigorian, vieil Arménien cultivé, dernier rejeton d’une famille installée depuis des siècles en Abyssinie. Hilarion se réjouit de l’arrivée d’une organisation humanitaire française à Asmara, dans le Nord de l’Erythrée.

    Ce n’est pas par altruisme qu’il les soutient, mais bien pour se rendre indispensable, afin de profiter de leur présence pour son plaisir personnel. La joie de sentir une animation nouvelle autour de lui, le plaisir de parler français (la langue qu’il associe aux plaisirs charnels), et l’illusion de tirer les ficelles. S’immiscer dans la vie de Grégoire, en particulier, lui donne une seconde jeunesse.
    Il observe les humanitaires avec une passion froide d’entomologiste, analyse qui met en avant les motivations égoïstes de chacun. Finalement peu d’entre eux sont vraiment dans la lutte désintéressée contre la famine, quelque part chacun trouve son compte à cette situation.

    D’ailleurs la famine, le dénuement, les maladies et les déplacements de populations sont peu évoqués, si ce n’est en toile de fond et pour leurs enjeux politiques.
    Le camp de Rama est installé loin des zones où se trouvent les réfugiés de la famine. Son emplacement semble choisi pour des raisons politiques retorses. Même si les hommes politiques ne sont peut-être pas dénués de vision idéologique à long terme, leurs choix impliquent de sacrifier les populations, et ils manifestent un grand détachement par rapport aux victimes.

    Les humanitaires sont confrontés à un dilemme : rester pour aider les malades et les affamés et sauver des vies, ou partir pour dénoncer la politique du gouvernement, le déplacement des populations enlevées et déportées dans les régions à coloniser. Grégoire, le jeune chef de mission, est atteint d’antchilite et prend ses décisions en fonction des pressions établies sur lui par ceux qui s’en prennent à sa petite amie.

    La population d’Asmara semble totalement indifférente au sort des populations affamées. Rufin peint une clique d’anciens colons « ensablés » sur place, sans autre attente que leurs petits trafics.
    P. 100, le marchand d’armes : « Nous vendons à qui veut bien acheter, et… je dirais que nous avons toujours été neutres. Neutres comme ces jeunes gens qui se nomment humanitaires. Je sais bien que l’idée est choquante ; elle n’en reste pas moins juste. Nous marchands d’armes, ne cherchons pas à influencer le cours des événements. Nous n’avons jamais ni protégé, ni idéal, ni ambition propre. Nous sommes au cœur de l’histoire sans la faire, comme les humanitaires. » (comparaison également avec les Suisses, passés de loyaux mercenaires sans états d’âmes à dévoués humanitaires)

    Rufin s’intéresse aux motivations des humanitaires, qu’il relie à celles des anciens colons. Pour opposer les deux vieux, Hilarion enrichi sans idéaux, et Riccardo, venu pour la gloire et resté pour les femmes, il utilise une image évoquée en 1935 sur le bateau qui amena en Ethiopie une cargaison d’italiens venus « qui pour la gloire, qui pour les moutons. Ceux venus pour les moutons espéraient devenir riches – ou moins pauvres- ; les autres, ils venaient pour la gloire. L’empire, pour eux, c’était d’abord une grande idée. Ceux qui venaient « pour la gloire » étaient des rêveurs, des idéalistes, les plus sensibles à l’antchilite »
    « l’antichilite » surnom donné par Riccardo, le vieil Italien, à la forme locale du « madamismo », la passion de certains colons pour les femmes indigènes, sans pour autant être capables de former de réels projets de vie avec elles.


    La position de Jean-Christophe Rufin semble témoigner dans ce roman d’une déception de l’humanitaire. Ou tout au moins d’une interrogation sur les motivations de ceux qui s’engagent dans les missions humanitaires, et sur leurs fragilités.

    Ses réflexions sur l’antchilite s’éclairent d’un jour nouveau lorsqu’on sait qu’il s’est marié avec une Erythréenne en 1986… Le lecteur ressent dans ces pages un attachement profond à l’Ethiopie, avec de belles envolées lyriques :
    p. 140 « Les premières pluies sont pour moi un spectacle somptueux et gratuit au cours duquel la nature fait un majestueux étalage de sa force et de sa poésie, en réveillant les couleurs, les parfums, en inventant des rythmes sur les toits de tôle. Par moments, après ces paroxysmes, elle se calme, comme un artiste qui prend de la distance pour contempler sa toile : assommé d’eau, le paysage souffle une haleine tiède et sous les vapeurs qui montent des feuillages brillent les couleurs vernies du végétal, de la terre et des pierres ruisselantes. »

  • Fabcaro

    Dernière minute : je reviens juste du festival de la Bulle d'bande dessinéeOr, à Brignais. J'étais face à.... Fabcaro ! Au moment même où il dédicaçait un album Zaï zaï zaï zaï pour les lecteurs du Prix M.O.T.S. il a été appelé à la tribune pour la remise de l'album d'or !!!

    Félicitations, Fabrice !

    Et pour aller voir la page web de cet autodidacte chez Dargaud, c'est là !

  • Prix M.O.T.S.

    prix des lecteurs

    Le lancement du 6ème prix des lecteurs, rebaptisé Prix M.O.T.S. avec l’arrivée d’Orliénas dans nos rangs, a eu lieu ce matin.

    Les élus présents ont marqué leur compassion pour les victimes des attentats parisiens, et une minute de silence a été respectée. Dans notre sélection, le roman L’orangeraie est particulièrement en lien avec l’actualité. Il évoque la préparation d’un attentat terroriste dans le Moyen-Orient, ses motivations indéfendables, et ses séquelles à long terme.

    Voici les livres que nous vous proposons de lire d’ici la fin mai. Avec l’aide de nos lecteurs, nous les avons choisis aussi variés que possible, afin de respecter aussi la demande d’une certaine légèreté…

    L’orangeraie, Michel Tremblay
    La variante chilienne, Pierre Raufast
    Venus d’ailleurs, Paola Pigani
    Les arpenteurs, Kim Zupan
    L’idée ridicule de ne plus jamais te revoir, Rosa Monteiro

    Ce n’est pas toi que j’attendais, Fabien Toulmé
    Les cobayes, Tonino Benaquista et Nicolas Barral
    Les esclaves oubliés de Tromelin, Sylvain Savoia
    L’île aux femmes, Zanzim
    Zaï zaï zaï zaï, Fabcaro
    Un certain Cervantès, Christian Lax

    prix des lecteurs

    Déjà distribués aux lecteurs présents, les livres circuleront dans nos 4 bibliothèques jusqu’à fin mai. Retenez déjà les dates suivantes :
    Rencontre d'auteur, samedi 12/03 à 11h à Soucieu.
    Débat et résultats, vendredi 03/06 à 18h30 à Thurins.

    prix des lecteurs

    Rappelons l’importance des bibliothèques comme lieu d’accueil, de rencontre, de culture et de formation. Des lieux de plaisir, certes, mais aussi de lutte contre l’isolement, l’intolérance et l’ignorantisme qui peuvent mener à des actes désolants.
    La solution est en nous.

  • Les arpenteurs

    roman étranger,etats-unis

     

    Les arpenteurs
    Kim ZUPAN
    Gallmeister (Nature Writing), 2015, 23.50€
    Traduit de l’américain The Ploughmen par Laura Derajinski

    Ce roman est avant tout le récit d’une relation complexe entre deux hommes aux antipodes l’un de l’autre, un assassin et son geôlier :

    John Gload, vieux criminel récidiviste, s’est enfin fait pincer et attend son procès dans la prison du Montana.
    De l’autre côté des barreaux, un jeune adjoint au shérif est astreint à passer des nuits de surveillance dans la prison. Valentine Millimaki essaie d’exercer son métier avec humanité (contrairement à certains collègues !), mais souffre de sentir sa vie et son mariage, lui échapper chaque jour un peu plus.

    "Dans le cadre de ses fonctions au bureau du shérif, il passait son temps à enquêter sur des délits ruraux et endurait son quota d’heures requises dans le vieux bâtiment de la prison adjacent au tribunal du comté. Mais il préférait le travail sur le terrain, au grand air, avec son chien de berger de trois ans [Tom] à pister les disparus dans la forêt, la broussaille, les canyons abrupts, des terres vierges, ces coins oubliés ou non référencés sur les cartes qui ne donnaient qu’une approximation de notre place en ce monde.
    Il les retrouvait parfois, écorchés ou couverts d’ecchymoses, boitant sur une cheville fracturée, ou d’autres encore à un stade avancé d’hypothermie… Mais depuis plus d’un an, maintenant, il n’avait retrouvé que des cadavres."

    Hanté par son armée de fantômes personnels, Millimaki est un homme vulnérable. Peu à peu, souffrant tous deux d’insomnie, John Gload et lui ont de longues conversations, et en viennent à une certaine compréhension l’un de l’autre… peut-être parce qu’ils partagent, chacun à sa façon, une proximité excessive avec la mort. …A moins que tout cela ne soit que manipulation de la part de John Gload !
    "Je ne sais pas si j’ai ce qu’on peut appeler une âme, Val, mais je sais la reconnaître chez les autres. Vous en avez une. Je l’ai vue toute barbouillée sur votre visage dès que je vous ai croisé".

    D’une beauté puissante, les Arpenteurs explore la frontière floue entre le bien et le mal. Pour l'auteur, qui oppose le huis-clos de la prison aux immenses espaces nord-américains, le Montana sauvage est une présence constante dans le récit, émaillé de descriptions de la nature. Malgré sa longueur et sa noirceur, j'ai été emportée par la puissance de ce roman et la complexité de ses personnages.

    Kim Zupan a exercé de nombreux métiers, il a fait des rodéos, travaillé comme pêcheur, charpentier, enseignant…

    Aline

  • Profession du père

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    Sorj CHALANDON

    Grasset, août 2015, 320 p., 19€

    Chaque roman de Sorj Chalandon m'a "rencontrée", et je n’ai jamais été déçue par cet auteur. Son dernier livre ne fait pas exception, même si le sujet en est plus personnel et  familial.

    Pasteur Pentecôtiste, Judoka ceinture noire, parachutiste, footballeur, chanteur… ou agent secret ? Si le jeune Emile Choulans n’a jamais su quel métier noter dans les cases des formulaires à remplir en début d’année, c’est qu’il croyait aveuglément ce que son père lui racontait, accessoires à l’appui : kimono, robe de pasteur ou béret de para en évidence sur la plage arrière de la Simca Vedette paternelle…

    L’auteur observe une famille dysfonctionnelle (proche de la sienne), à travers les yeux d’un collégien, éperdument admiratif et soumis à son père, dont le lecteur devine rapidement qu’il est mythomane et paranoïaque. Dans le microcosme familial, mère et fils sont maintenus en état de sujétion et d’alerte constante.

    "Un soir de juin 1958 une amie de ma mère l’avait invitée à un récital des Compagnons de la Chanson, au théâtre romain. J’avais 9 ans. C’était la première fois qu’elle demandait à sortir seule le soir. Même avant ma naissance, mon père s’y était toujours opposé…" Le résultat ne s’était pas fait attendre "Tu vas dormir sur le paillasson, salope"… Elle a effectivement dormi derrière la porte, son fils ayant l’interdiction formelle de lui ouvrir sous peine de raclée. "C’était il y a trois ans. Depuis, Maman n’a plus jamais allumé la radio. Et plus jamais chanté."

    Au moment où Charles de Gaulle "abandonne l’Algérie", André Choulans, le père, se sent trahi et décide de continuer la guerre sur le territoire français. Soit-disant officier de l’OAS, il transfère ses frustrations sur Emile et lui donne des missions : barbouiller les murs d’inscriptions OAS, poster des lettres de menace…  L’enfant est réveillé en pleine nuit pour se mettre au garde à vous, "torse nu et pieds glacés" et faire des séries de pompes en slip. A tout cela, la mère répond faiblement « Tu connais ton père ».

    Emile a des crises d’asthme provoquées par l’angoisse, manque de sommeil,et ne parvient plus à se concentrer en classe... ce qui provoque de nouveaux drames. On éprouve de la pitié pour cet enfant maltraité et abusé psychologiquement. On ne comprend pas que son amour filial y résiste ! Vient même un temps où Emile utilise les méthodes de son père sur  un camarade, espérant que celui-ci saura l’arrêter… mais les méthodes fonctionnent trop bien !

    Cette expérience extrême l'aura-t-elle aidé à s'affranchir de l'ascendant familial ? Reproduit-on les schémas parentaux ? Le lecteur retrouve brièvement Emile adulte dans sa relation à ses parents et à son enfant... mais beaucoup reste à imaginer.

    Dans ce roman bouleversant, étouffant bien que parcouru d'intermèdes plus légers, j’ai lu la crédulité d’un enfant abusé psychologiquement par son père, mais aussi la complexité des relations familiales, tandis que Brigitte s’est attachée au contexte historique des "événements d’Algérie" du côté français.

    Les entretiens avec l'auteur apportent un éclairage personnel. "Si le père n'avait pas été violent, je crois que l'enfance d'Emile (mon enfance) aurait été formidable !". Voir aussi les critiques de ses romans Retour à Killybegs et Le quatrième mur.

    Aline

  • Le grand méchant renard

    bande dessinée,humourLe grand méchant renard

    Benjamin RENNER

    Delcourt, 2015, 192 p., 16.95 €

     

    Bande dessinée hilarante, pour tous âges.

    A la ferme, un renard froussard et inefficace tente de s’affirmer en tant que prédateur, face à un  chien de garde paresseux et blasé  et une poule caractérielle. Devant l’échec de ses méthodes, le Grand Méchant Loup lui suggère de développer une nouvelle stratégie : voler des œufs et élever les poussins pour les croquer, à parts égales.

    Le graphisme et le dessin ne sont pas forcément faciles à lire pour certains, mais ces caricatures d’animaux sont vraiment drôles, avec un personnage du renard très attachant.

     

    Malgré le côté très léger de ce roman graphique, on peut en tirer quelques leçons !

    1. Peu importe ce que nous sommes, l’amour peut faire tomber les barrières. Un poussin peut aimer un renard comme sa mère, et un renard s’attacher à un poussin ;

    2. On peut appartenir à une catégorie, une race, et ne pas en présenter tous les critères habituels. L’habit ne fait pas le moine, et le renard ne fait pas peur.

    3. La gentillesse et la compréhension peuvent régler des conflits. Ici, à la ferme, la gentillesse du renard fait plus progresser l’entente que l’agressivité de la poule.

    A mettre entre toutes les mains.

    Pascale et Aline

  • La valise rose

    La valise rose
    Susie MORGENSTERN, ill. Serge BLOCH
    Gallimard jeunesse, mars 2015, 28p., 13.50€

    couverture_La_valise_rose.jpgPersonne n’a compris quelle idée loufoque était passée par la tête de grand-mère quand elle a apporté son cadeau de naissance à Benjamin : une valise rose !
    Quoiqu’en ait pensé son entourage, Benjamin l’a adoptée tout bébé, et n’a pas cessé de lui trouver de nouveaux usages. La valise a été tour à tour couffin, coffre aux trésors, lit pour les peluches, garage à camions, tam-tam, soutien pour apprendre à marcher, cartable… et valise aussi parfois, bien sûr. Mais comme « il faut parfois faire des compromis dans la vie » il accepta enfin un jour de s’en séparer… je ne vous dis pas pourquoi (ou plutôt pour qui).
    Un album sympa à lire avec les enfants, qui s’attacheront à cet objet, et sauront lui inventer plein d’autres usages !

     livre_La valise rose.jpg

    Avec ses illustrations au style rétro en teintes pastel où « flashe » le rose fluo, cet album est un objet inattendu.

    Pour en voir plus, lien vers le Bloch’s Blog

     

    Par son histoire, écrite au passé et ouvrant sur plusieurs niveaux de réflexion, il évoque un conte… et c’est effectivement une leçon de vie. On peut en faire une lecture multiple :
    C’est l’histoire simple d’une valise choisie comme doudou ou objet favori.
    Oui, mais c’est aussi une étude des relations inter-familiales : les adultes sentiront l’opposition entre la fantaisie de la grand-mère et le conformisme de la maman, ainsi que l’hostilité (voilée ?) entre belle-mère et belle-fille… La mère croît savoir mieux que tous ce qui est bon pour son fils, mais n’est pas à son écoute. Le père, lui, a une vraie place de conciliateur.
    J’ai aussi trouvé dans cet album un plaidoyer anticonformiste, pour la capacité à faire ses propres choix : « Les moqueries au collège sur la couleur et la forme de son « cartable » ne le dérangeaient pas du tout. Comme sa grand-mère il ne cherchait pas à ressembler tout le monde, à être invisible« .

    Bref, il y a de quoi se nourrir dans cette valise rose, ne la ratez pas!

    Aline

  • Soudain, seuls

    Soudain, seuls.gifSoudain seuls

    Isabelle AUTISSIER

    Stock, 18,50 €

     

    Un livre qu'on ouvre et qu'on ne lâche pas.

    Ludovic travaille dans l'événementiel, il est fougueux, séducteur, insouciant et est doté d'une grande aptitude au bonheur. Louise travaille dans un centre d'impôts, elle est effacée, solitaire, prudente et a une seule passion, l'alpinisme. Ils se rencontrent, ils s'aiment, mais pour Ludovic, la vie est trop banale, trop monotone à Paris, il faut rompre les habitudes, vivre une aventure et il convainc Louise de faire le tour du monde en voilier.

    Les premiers mois sont magnifiques mais le rêve va se fracasser lorsqu’ils décident de faire une petite halte sur une île déserte entre la Patagonie et le Cap Horn, réserve protégée uniquement autorisée aux scientifiques. L'escapade va vite tourner au cauchemar, leur voilier ayant disparu emporté par une tempête.

     

    Comment survivre dans une nature hostile avec pour toute nourriture des manchots sur une île où aucun bateau ne vient accoster ? Comment un couple peut-il résister dans un face à face qui renvoie chacun à ses responsabilités et à ses faiblesses ? Jusqu’où l'être humain est-il capable d'aller pour survivre ?

     

    Isabelle Autissier nous fait éprouver la peur, la froid, la faim, l'épuisement, la désespérance et aussi l'amour et la haine dans un huit clos terrible. Elle sait décrire la tension psychologique qui monte peu à peu et elle nous amène à réfléchir sur les réactions d'un être humain plongé dans une situation extrême.

    Annie

  • Rentrée du Bouillon

    Pour cette séance de septembre, nous avons partagé nos coups de coeur et nos lectures de l'été.

     

    forêt d'arbres creux.gifUne forêt d’arbres creux

    Antoine CHOPLIN

    La Fosse aux ours, 2015, 115 p, 16€

    République Tchèque 1941, une famille arrive dans la ville-ghetto de Terezin (Theresienstadt). Architecte, Bedrich, le père, est alors affecté au bureau des plans pour agrandir les camps. La nuit par contre il dessine clandestinement tout ce qui se passe dans le camp : portrait, caricature, moments de vie… le tout caché dans une latte du bureau à dessin.

    Toujours l’écriture ramassée et évocatrice d’Antoine Choplin, un  de nos auteurs favoris, dont nous avons aimé La nuit tombée (sélection du Prix Mes Sou Thu 2013) et Le héron de Guernica !

    L’auteur  sera l’hôte de la librairie Murmure des Mots pour le café parlotte du 6 novembre !!!

     

    part des flammes.gifLa part des flammes

    Gaëlle NOHANT

    Héloïse d’Ormesson, 2015, 492 p, 22€

    Mai 1897, le Bazar de la Charité prend feu : 128 personnes trouvent la mort. Gaëlle Nohant brode ici une histoire autour de cet évènement de la fin du XIXe siècle. Elle y dépeint le Paris de l'époque, la vie des gens et surtout des femmes, pour qui l’importance du nom et du mariage est déterminante. Réflexion sur la lutte des pouvoirs et l’impact de la vie religieuse sur les mœurs. Les descriptions sont tellement minutieuses et détaillées qu’on a l’impression d’y être, être parmi la foule et les étals, au moment où est projeté le premier film cinématographique.

     

    immeuble des femmes.gifL’immeuble des femmes qui ont renoncé aux hommes

    Karine LAMBERT

    M. Lafon, 2014, 250 p, 14,95€

    Le titre parle de lui-même : un immeuble et sa propriétaire, ancienne danseuse étoile, déçue par les hommes. Dans son immeuble elle souhaite que les locataires aient toutes renoncé aux hommes. Karine Lambert nous raconte donc l’histoire de cinq femmes d’âges et d’univers différents, qui ne veulent plus entendre parler d’amour. Seul mâle toléré : Jean-Claude le chat. Jusqu’au jour où Juliette, la nouvelle locataire de 30 ans, débarque au sein de ce petit groupe, sans pour autant faire une croix sur les hommes… Roman à la fois drôle et grave qui nous parle des difficultés d’aimer et des blessures que l’on porte en soi.

     

    Restaurant de l'amour.gifLe restaurant de l’amour retrouvé

    Ito OGAWA

    Philippe Picquier, 2013, 242 p, 19€

    Traduit du japonais par Myriam d’Artois-Ako

    Une jeune femme de 25 ans perd la voix après une rupture sentimentale très douloureuse. Elle décide donc de retourner dans la campagne japonaise, chez sa mère qui vit avec un cochon apprivoisé. Elle se découvre des talents de cuisinière et ouvre son restaurant, « l’escargot ». Mais attention, pas un restaurant quelconque : là, les clients seront triés sur le volet, et elle leur cuisinera des plats uniques pour réveiller en eux des émotions enfouies. Un premier roman très bien écrit, même si la fin est un peu rapide.

     

    Je veux devenir moine zen.gifJe veux devenir moine zen

    Kiyohiro MIURA

    Philippe Picquier, 2005, 142p, 6,10€

    Traduit du japonais par Elisabeth Suetsugu

    Un cadre, rentré au Japon après 10 ans aux Etats-Unis, se rend régulièrement au temple proche avec son jeune fils. L’éducation de l’enfant se fait en partie au temple, dirigé par  une femme pleine de sagesse et de bon sens. Le fils finit par désirer devenir moine zen. Ce récit, très zen, raconte comment le voeu du jeune garçon bouscule ses parents et transforme  les relations familiales.

     

    Ma vie de pingouin.gifMa vie de pingouin

    Katarina MAZETTI

    Gaïa, 2015, 269 p, 21€

    Traduit du suédois par Lena Grumbach

    Le roman alterne les récits de trois personnages principaux, lors d’une croisière en Antarctique : la jeune Wilma ; Thomas, divorcé ayant perdu la garde de ses enfants ; et Alba, 72 ans, qui observe et retranscrit les comportements animaux et humains. Si l’on trouve des situations graves dans ce microcosme, le ton reste assez léger, et le roman est agréable à lire, même si ce n’est pas un chef d’œuvre.

     

    heure indigo.gifL’heure indigo

    Kristin HARMEL

    Denoël, 2014, 426 p, 21,50€

    Traduit de l’américain The Sweetness of Forgetting par Christine Barbaste

    Hope tient une pâtisserie à Cape Cod. Divorcée, elle a des rapports tendus avec sa fille, qui l’aide néanmoins beaucoup pour tenir la boutique familiale.  Sa grand-mère, Rose, atteinte d’Alzheimer, sait qu’elle a peu de temps pour lui transmettre un secret familial, qu’elle a caché toute sa vie. Dans un jour de lucidité, elle lui confie une liste de noms et lui demande de partir à la recherche de ces personnes à Paris. Les recettes transmises par la grand-mère (contenues dans le livre) sont aussi des indices, qui guideront  Hope dans sa découverte. Cette enquête familiale se révèlera aussi historique, et mènera Hope jusqu’à une synagogue et une mosquée à Paris. Elle lui permettra, en connaissant ses origines, de mieux se comprendre elle-même. Le roman offre de belles pages sur les Justes, et le précepte albanais de Besa, promesse de protéger ses hôtes et devoir de venir en aide à qui le demande. En même temps, c’est une histoire d’amour facile à lire.

     

    secret de la manufacture.gifLe secret de la manufacture de chaussettes inusables

    Annie BARROWS

    Ed. du NIL, 2015, 621 p, 21€

    Traduit de l’américain The Truth According to Us par Aline Azoulay et Dominique Haas

    Eté 1938, aux Etats-Unis. Layla, jeune fille de bonne famille,  refuse le riche parti choisi par son père sénateur, qui la met au pied du mur : désormais elle doit travailler pour assurer son indépendance. Envoyée à Macedonia, elle doit rédiger la chronique de cette petite ville. Elle est logée dans l’excentrique famille des Romeyn, désargentés, anciens propriétaires d'une grande fabrique de chaussettes– Les Inusables Américaines – qui a été ravagée par un incendie plusieurs années auparavant. Ce même été, Wilma, 12 ans, décide de démêler des histoires des adultes, et met à jour des secrets bien dissimulés.

    Ce roman, en partie épistolaire, est le premier rédigé entièrement par l’auteur, après "Le cercle littéraire des amateurs d’épluchures de patates", qu’elle avait fini de mettre en forme pour sa tante Mary Ann Schaffer. Il est un peu plus poussif à démarrer, mais plein de charme, et les personnages en sont attachants.

     

    roi des ombres.gifLe roi des ombres

    Eve DE CASTRO

    R. Laffont, 2012, 478 p, 21,50€

    Roman historique prenant, retraçant le Versailles du Roi Soleil, panier de crabes où vingt mille personnes, du plus haut au plus bas de l'échelle sociale, s'agitent avec le rêve de grimper vers la lumière. Le Roi des Ombres est le roman de l’envers des décors, et en particulier des artisans qui ont œuvré aux circuits d’eau et aux fontaines de Versailles.

     

    Lilah.gifLilah

    Marek HALTER

    R. Laffont, 2004, 244 p, 21€

    Troisième tome de la trilogie des Femmes de la Bible, c’est un roman historique documenté qui débute en 397 avant Jésus-Christ.  Lilah est la sœur d’Ezra et l’encourage à ramener les Hébreux  Terre Promise, et se dresse contre son extrémisme religieux.

     

    Jules.gifJules

    Didier VAN CAUWELAERT

    Albin Michel, 2015, 288 p, 19,50€

    Histoire d’un chien d’aveugle. Alice, la personne dont il avait la responsabilité retrouve la vue. Il en est tout désorienté, et passe à d’autres maîtres… Une histoire chaleureuse et loufoque où Jules a du mal à réorganiser sa vie et celle de ses maîtres.

     

    femme au carnet rouge.gifLa femme au carnet rouge

    Antoine LAURAIN

    Flammarion, 2014, 236 p, 18€

    A Paris, une femme agressée est emmenée à l’hôpital. Laurent trouve son sac tout près de sa librairie. Comme il ne contient pas de papiers d’identité, Laurent enquête à partir des objets qu’il trouve dans le sac, et s’attache à sa personnalité. Un roman qui n’est pas sans évoquer l’atmosphère d’Amélie Poulain.

     

    Autres lectures évoquées :

    Et tu n’es pas revenu, Marceline LORIDAN-IVENS

    La ballade de Lila K, Blandine LE CALLET

    Les souvenirs, David FOENKINOS

    Le voleur d’ombres, Marc LEVY

    L’idée ridicule de ne plus jamais te revoir, Rosa MONTERO, grand coup de coeur pour certaines lectrices... mais pas toutes ! (voir critique)

  • Le nageur

    immigration, Sri Lanka

     

    Le nageur

    Roma TEARNE

    Albin Michel, 2015, 22 €

    traduit de l'anglais par Esther Ménévis.

     

    Le nageur, c’est le surnom donné à Ben par les femmes de sa vie.

    Depuis que son compagnon l’a quittée pour une femme plus jeune – et plus fertile – Ria s’est retirée à Eel House,  la "maison des anguilles", son refuge d’enfance au bord de la rivière au nord-est de l'Angleterre. C’est l’endroit où elle retrouve ses souvenirs heureux, et peut travailler à sa poésie en toute quiétude. Pas de compagnie, si ce n’est son vieil ami Eric, pas bien loin. Elle évite au maximum les gens du coin, tolère une vague copine d’enfance plus agaçante qu’autre chose, redoute la visite occasionnelle de son frère, ambitieux et avide.

    La nuit, un nageur solitaire traverse la rivière, visite son jardin et sa maison, vide sa huche à pain et hante son piano… Etrangement, elle se sent un lien avec ce nageur, malgré les rumeurs qui battent la campagne anglaise d’animaux égorgés, d’immigrés clandestins et de terrorisme…

    Pour éviter de gâcher votre plaisir de découverte, je ne dévoilerai pas l’intrigue,  mais c’est un beau roman où se rencontrent des personnages blessés, parfois pour le meilleur, mais pas toujours. Un roman intense, qui  évoque aussi l’accueil –ou pas- des étrangers et des réfugiés politiques dans un contexte où la paranoïa peut conduire aux pires erreurs. A l'heure où les immigrés ne sont plus que des chiffres, il humanise l'un deux, réfugié Tamoul, avec son histoire personnelle et son besoin de se réapproprier sa vie.

    J'ai beaucoup aimé l'ambiance de la première partie, et l'ensemble du livre est un franc coup de cœur pour Elisabeth et Jean-Bernard.   Aline