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Critiques de livres - Page 26

  • Land art

    Un grand coup de cœur pour les livres de Land Art réalisés par Marc POUYET. Au fil de ses promenades, l'artiste glane des éléments naturels et laisse s'exprimer son imagination. Ses livres présentent les photos de tableaux, jeux ou objets éphémères et poétiques, dont la beauté nous interpelle. L'apparente simplicité du concept incite le lecteur à ramasser à son tour fleurs, cailloux, branches, marrons, glaçons... et à créer.

     land artDans la collection Petite Plume de Carotte, saison par saison, Marc Pouyet enchante les plus petits avec des albums cartonnés sans paroles : à gauche, l'objet naturel utilisé, à droite le tableau réalisé.

    Artistes de nature en ville, Joueurs de nature,... et les autres titres publiés chez Plume de Carotte, émerveillent ou amusent les lecteurs depuis la maternelle et jusqu'aux adultes,  inspirant l'artiste qui sommeille en chacun de nous.

      land art

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    land art

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    Pour aller plus loin :

    le blog de Marc Pouyet.

    A Chassieu, un grand parcours d’œuvres de Land Art a fédéré la bibliothèque, les écoles, les associations, les centres de loisirs… et les services municipaux pendant 7 mois.

    Autres livres :
    Le Land-art avec les enfants, d’Andreas Guthler (La Plage, 2009), qui développe les aspects pédagogiques et pratiques du Land-art, et propose des activités à réaliser avec les enfants ;
    Land art, de Floriane Herrero (Palette, 2012), qui présente et explique les œuvres d’une cinquantaine d’artistes du monde entier.

  • Mes Sou Thu n° 4

    Le prix des 3 villages a motivé 48 lecteurs de Soucieu-en-Jarrest, et presque autant à Thurins et Messimy. Ce prix est l’occasion pour les lecteurs de diversifier leurs lectures : nouveaux auteurs, et des livres qu'ils n'auraient pas forcément choisis. Chaque année, une trentaine de lecteurs de romans découvrent aussi la richesse de la bande dessinée.

    Samedi, nous avons marqué la clôture du prix MES-SOU-THU par une rencontre à Messimy. Une cinquantaine de lecteurs des trois communes se sont retrouvés pour une discussion autour de la sélection des 12 ouvrages, et de la proclamation des résultats.

    Dans la catégorie des romans, le roman préféré à Soucieu est Un verger au Pakistan, de Peter HOBBS. Un court roman poétique et nostalgique, malgré son thème assez sombre : un homme, jeune encore, se reconstruit peu à peu, après des années terribles passées en prison,  injustement, pour avoir aimé la fille qu’il ne fallait pas. (critique). Cependant le grand vainqueur pour les 3 communes est Le bruit de tes pas, de Valentina d’URBANO, une émouvante histoire d’amour et de violence dans une banlieue triste italienne.(critique)

    Pour les bandes dessinées, c’est très nettement Mauvais genre, de Chloé CRUCHAUDET, qui l’emporte. La jeune auteure lyonnaise s’est inspirée de l’histoire vraie d’un poilu déserteur, traumatisé dans les tranchées, qui se travestit en femme pour échapper aux recherches, et devient le personnage de Suzanne… (Prix du Public Cultura au festival d'Angoulême 2014).

    Voici l'ensemble des résultatsprix des lecteurs

                                                    Moyenne (notes sur 10)

                                                    Soucieu         3 villages

    ROMANS                                                                         .    

    Un verger au Pakistan              7.68               7.57

    Le bruit de tes pas                    7.48               7.62

    Trois grands fauvres                    6.67               6.61prix des lecteurs

    L’invention de nos vies                 6.45              6.98

    Faillir être flingué                          6.34              6.37

    Le plus petit baiser jamais…          5.68              6.12

     BANDES DESSINEES                                                     .

    Mauvais genre                            8.30              7.98

    Stevenson, pirate intérieur            7.88              7.12prix des lecteurs

    Ma révérence                              7.75              7.53

    Tyler Cross                                  6.89              6.48

    Mamada                                       6.75              6.92

    Les aventures de Poussin 1er       6.13              6.43

  • La passe-miroir

    roman ado,aventure,fantasy

    La passe-miroir, livre 1 :

    Les fiancés de l'hiver

    Christelle Dabos

    Gallimard Jeunesse, 2013, 18 €

    Depuis la Déchirure, la terre est éclatée en petits morceaux suspendus, en gravitation autour du noyau. Ces  "Arches" sont indépendantes, chacune fonctionne selon une organisation différente, qui découle des dons particuliers de son "Esprit" fondateur.

    Sur Anima, les dons se développent tous en lien avec les objets : animer les transports, réparer le papier, etc. Pour sa part, Ophélie est Liseuse, ce qui signifie qu'elle peut, au toucher, retracer l'histoire d'un objet et de ceux qui l'ont possédé. Son don en fait une excellente conservatrice de musée. C'est une héroïne introvertie, maladroite, mal fagotée, qui s'intéresse à la vérité des gens, plus qu'à leur apparence. Elle possède en outre un talent de passe-miroir.

    Suite à un mariage arrangé par les Doyennes d'Anima, elle suit son fiancé Thorn, un grand escogriffe austère et impénétrable, sur l'Arche du Pôle. Il lui faut s'adapter à un monde totalement différent du sien, où les Familles aristocrates disposent de dons dangereux, et tenter de survivre au milieu des mortelles intrigues de la Citacielle.

    Dans ce roman très imaginatif, l'auteur sait installer un univers complet original. L'intrigue est prenante et les personnages, peu ordinaires, souvent ambivalents, sont convaincants et attachants. La fin du tome 1 tient en haleine, le livre 2 est prévu pour fin 2014.

  • Les brumes de l'apparence

    apparence,mort,espritsLes brumes de l’apparence

    Frederique DEGHELT

    Actes Sud, mars 2014, 21.80 €

     

    Que dire du dernier roman de Frédérique Deghelt sans trop en dévoiler…

    Gabrielle, la narratrice, est heureuse dans un couple brillant : mariée depuis une vingtaine d’années à un chirurgien esthétique de renom, elle-même responsable pleine d’imagination d’une entreprise d’évènementiel. Elle ne croit pas à la crise de la quarantaine, et pourtant sa vie est remise en question de façon surprenante.

    Suite à un héritage inattendu, elle se rend dans la France profonde pour mettre en vente la propriété qui lui a été léguée. Parisienne invétérée, elle n’a aucune intention de s’attacher à cet endroit, et pourtant…. et pourtant ce retour sur la terre de ses ancêtres est une remise en cause totale, bouleversante, par la découverte de particularités familiales que sa mère lui avait toujours celées.

     

    Quoique ce ne soit pas son sujet principal, comme dans La vie d’une autre, l’auteur explore la relation d’un couple constitué depuis longtemps. Elle remet en question cette relation basée sur les habitudes et une perception extérieure de l’autre, faussée par les apparences et par nos projections sur nos proches. La narratrice passe de l’autre côté du miroir, et tente de vivre au-delà des brumes de l’apparence :

    "Est-ce que je pensais à tout ça avant ? Est-ce que tisser des liens avec l’au-delà de cet univers n’oblige pas à plonger profondément en soi, à traverser puis à dépasser cette enveloppe du corps et tous ses attributs superficiels et ridicules ?... L’apparence a besoin d’être oubliée pour que nous devenions nous-même."

     

    Intégrée au roman, l’auteur engage une réflexion philosophique sur ce qui nous attend après la mort, et par ricochet sur notre façon de vivre, excessivement basée sur des considérations matérielles. "Le monde ne va pas plus mal qu’autrefois, il irait même plutôt mieux, mais personne n’est au courant. C’est plutôt malin, non ? On a même réussi à faire croire que le bonheur appartient aux riches et que cette richesse aux biens sans envergure est devenue un but honorable pour tous."

     

    Frédérique Deghelt ne manque pas de développer des idées intéressantes, même si je n’adhère pas à son postulat de départ, ni à ses démonstrations « scientifiques ». Ses réflexions sur l’au-delà sont développées avec tellement de force, que je me demande vraiment si elle adhère aux convictions de son héroïne ou si c’est un jeu intellectuel.

    Pour répondre à cette question, et à d'autres, rendez-vous à la rencontre avec l'auteur organisée par la librairie Murmure des Mots jeudi 24 avril à partir de 16 heures !

  • N'entre pas dans mon âme avec tes chaussures

    tsiganes,internementAutour du feu, les hommes ont le regard sombre en ce printemps 1940. Un décret interdit la circulation des nomades, et les roulottes sont à l’arrêt. En temps de guerre, les manouches sont considérés comme encore plus dangereux et donc la Kommandantur d’Angoulême exige qu’ils soient rassemblés dans  le camp des Alliers.

    Alba y entre avec sa famille. Elle a 14 ans, elle va y passer 6 ans, avec l’appel du matin, la soupe claire, le retour des hommes chaque soir, car ils sont réquisitionnés pour le travail. C’est pendant cette période qu’elle deviendra femme. Elle se fera des amis, rencontrera son amoureux, fera connaissance aussi avec un gardien humain, une visiteuse très chaleureuse… dont on s’aperçoit peu à peu qu’elle est dans la résistance et qu’elle échange des papiers avec un des gardiens. Alba verra mourir sa mère, des compagnes et compagnons d’infortune.

    Paola Pigani, vit dans la région lyonnaise. C’est son premier roman, après des contes et des nouvelles. Elle a grandi dans une famille nombreuse d’origine italienne, dans les Charentes. Elle y rencontre la communauté manouche, et surtout une femme qui avait été internée dans ce camp des Alliers. Ici, elle fait revivre la douleur et la fierté des Tsiganes. N'entre pas dans mon âme avec tes chaussures, dit le proverbe: on n'entre pas impunément chez les Tsiganes, ni dans leur présent ni dans leur mémoire.

    N’entre pas dans mon âme avec tes chaussures

    Paola Pigani

    éd. L. Levi, 2013, 213 p., 17.50 €

    Maryvonne

     

  • Princesse Bari

    corée,immigration,chamanismeItinéraire d’une jeune Nord-Coréenne, 7ème fille de sa famille, depuis son village natal jusqu’à un Londres clandestin.

    Non désirée, Bari est abandonnée à la naissance, mais devient pourtant la petite fille préférée de sa grand-mère, reliée à elle par un don commun de chamanisme. A la fin des années 1990, sa famille est contrainte de fuir le régime coréen, dispersée et poussée toujours plus loin par la famine. Les qualités de voyante de Bari l’aident à surmonter la perte des siens et à exceller dans sa profession de masseuse, que ce soit en Chine ou en Angleterre après une terrible traversée cachée par les "passeurs de serpents" à fond de cale d'un cargo.

      

    Le récit intègre beaucoup de rêves et de sensations chamaniques, Bari est orientée et conseillée par l’esprit de son chien et de sa grand-mère. Elle comprend ses patients avec l’aide de fantômes de leur passé. Ce qui nous choquerait dans un roman occidental semble ici naturel, lié aux croyances asiatiques et au personnage de Bari.

    L’auteur a su rendre l’universalité de la souffrance, des forces qui poussent les populations à émigrer, la bestialité des trafics de migrants, la volonté humble d’intégration dans un nouveau pays. Au contact de toutes les personnes qu’elle rencontre, de la Chine au Londres multiethnique, Bari apprend la tolérance et se forme une idée  globale et harmonieuse d’une spiritualité qui englobe toutes les religions. Soutenue par la légende de la Princesse Bari que lui racontait sa grand-mère, elle progresse dans la recherche de l’acceptation, du pardon et de l’harmonie.

    L’une de mes premières lectures coréennes, qui m’encourage à continuer.

    Princesse Bari

    HWANG Sok-Yong, éd. P. Picquier, 2013 , 19 €

    Traduit du Coréen

     

  • Eduard Einstein, le fils oublié

    psychiatrieMileva Einstein a élevé ses deux fils seule, après le départ d’Albert et son remariage. Très proche d’Eduard, elle est néanmoins contrainte de le faire interner en 1930 au Bürghölzli de Zürich. Eduard n’a que 20 ans, et passera la plus grande partie de son existence dans cet hôpital.

    « Nous sommes en 1930. La science a accompli des progrès fulgurants ». Sa mère et les maîtres de la psychiatrie tentent de lui faire suivre les traitements de pointe : électrochocs, cure de coma diabétique induit,… avec les résultats qu’on imagine !

    L’auteur fait entendre la voix d’Eduard, diagnostiqué schizophrène, dont la bonne volonté et la lucidité –partielle- sont poignantes. En alternance, le récit  s’attache aux pas de sa mère, douloureuse et passionnée, et à ceux de son père, incapable de faire face aux problèmes psychologiques d’Eduard. Albert Einstein aura été le grand absent de la vie de son fils, et ce depuis le jour de sa naissance, tandis que la renommée de ce géant aura pesé lourdement sur lui !


    En plus de ces portraits psychologiques, le roman situe la vie d’Einstein dans son époque : la montée du nazisme à Berlin, la position de la Suisse pendant la guerre,  l’attitude ambivalente des Etats-Unis par rapport à l’immigration d’Albert Einstein et la montée du maccarthysme,…


    Le cas Eduard Einstein : roman

    Laurent Seksik

    Flammarion, août 2013, 19€

  • Petit Frank architecte

    album, architecture, designPetit Frank et son grand-père vivent à New-York. Ils se considèrent chacun comme architecte, mais ont des conceptions de leur métier très différentes.  Petit Frank imagine sans cesse de nouvelles créations, à partir de tous les matériaux qu'il rencontre : macaronis, livres, cuillères, rouleaux de papier toilette…  Mais Papy Frank, figé dans une conception traditionnelle, est sceptique : pour lui, ce n'est pas du travail de VRAI architecte.

    Un jour, accoutrés de canotiers, nœuds papillons et petites lunettes assortis, ils visitent le MoMA et découvrent des œuvres d'autres architectes : Frank Lloyd Wright, Frank O. Gehry… Inspirés par cette visite, ils rentrent chez eux et laissent libre cours à leur imagination pour "construire des immeubles de toutes sortes : des grands, des gros, des ronds et un autre tout en cookies au chocolat".

    Un album à la fois facile d'accès et très riche, à déguster sans se presser, qui offre une ouverture sur l'architecture et le design, rapproche ces deux domaines et incite à la création. Une page documentaire en fin de livre permet d'en apprendre un peu plus sur les architectes et designers cités, et donne envie de relire l'album avec attention pour trouver les œuvres évoquées.

    C'est aussi une petite leçon de sagesse : la visite a permis à Petit Frank de découvrir d'autres créateurs qui le confirment dans ses expérimentations, et à Papy Frank d'acquérir un peu de sagesse : lorsqu'il cesse de regarder du haut de son grand âge et de son expérience, lui aussi peut encore apprendre, et passer de formidables moments avec son petit-fils.


    L'illustration est originale, riche en détails instructifs et non dénuée d'humour. Avec sa palette originale de gris, ambre, roux, vert olive et crème, elle permet une introduction au MoMA… ou pour nous français plus généralement  à l'architecture et au design.


    Bel album jeunesse, original.


    Petit Frank architecte

    Frank Viva

    Publié cet été aux USA par le MoMA (Museum of Modern Art), en octobre 2013 par 5 continents éditions (Milan), 17.50 €

  • Trois grands fauves

    Trois grands fauves, Hugo BORIS
    Trois histoires  intimes et universelles : on en sort grandi !
    Qu'est ce qui fait un destin?  L'expérience initiale de la mort, le désir de vivre et  le désir...  tout court.

    Le talent de l'auteur (33 ans) lui  permet d'éviter l'ornière de l'étude psychologique réductrice.  Hugo moribond  à sa naissance, Danton enfant défiguré par un taureau ou le très jeune Churchill miraculé d'une attaque sanglante construiront leur destin sur ces expériences extrêmes. On se plonge avec régal dans trois scènes fortes, tranches de vie singulières et foisonnantes de détails qui font office de biographie. 

    Entre ombre et lumière, l'auteur choisit parfois la face cachée, ne nous surprend guère en décrivant Hugo, géant d'humanisme et littérature, incorrigible coureur de jupons... Si ce n'est que l'art du portrait se savoure :  "Chambrières, cuisinières aux grands pieds,  il sait les mots qu'il faut pour les faire se déshabiller ces couturières maigrillottes, lavandières aux mains rouges... ces domestiques qui ont cru qu'il les appelait pour laver le parquet de sa chambre... "  (Voilà qui n'est pas sans rappeler quelque épisode médiatique récent..? Avec moins de façons). Cassant avec son fils, inconsolable et génial grand-père, Victor Hugo est la figure la plus controversée, magnifiquement décrit. Danton est immortalisé dans une superbe scène, attendant son tour (il fut le 15ème ce jour là) sous  la guillotine.

    En quelques lignes, l'auteur a su nous rendre proches ces trois héros, décrire leurs doutes, leurs misères... sans rien ôter de leur panache. Ils en sortent grandis... et nous aussi !

    Sylvie (voir aussi critique de Ginette)

  • Bouillon d'auteurs algériens

    Un grand merci à Maryvonne d'avoir partagé avec nous ses connaissances sur les auteurs algériens. Ce compte rendu ne rend pas justice aux commentaires des lectrices, mais il permettra aux uns et aux autres de se procurer les livres cités.

    Nous avons tout d'abord évoqué des ouvrages récents, dont plusieurs écrits par des femmes, avant de nous pencher sur des auteurs algériens plus "classiques" de la seconde partie du 20ème siècle.

     

    BOUALEM SANSAL

     

    Le village de l'Allemand : ou le journal des frères Schiller

    Gallimard, (Blanche), 2008, 263 p., 21.30 €

    Prix RTL Lire 2008

    Le récit est mené à rebours, à partir du journal intime de deux frères, Rachel (Rachid Helmut) et Malrich (Malek Ulrich). Nés en Algérie de père allemand et de mère algérienne, venus en France faire des études, logés chez un oncle dans une cité peu reluisante, ils ont "tourné" de façon bien différente : l'aîné affiche une belle réussite, tandis que le second traficote et traîne dans la banlieue.

    En 1994, dans leur village près de Sétif, leurs parents sont assassinés par un groupe d'islamistes. Le père, qui avait énormément œuvré pour la population (construction, irrigation,…), était pourtant considéré comme un saint homme. Rachid, rentré au village d'Aïn Deb après leur décès, retrouve des documents sur la première vie de son père, dans l'Allemagne nazie, et ne supporte pas ces révélations.

    Le roman propose une réflexion profonde, nourrie par la pensée de Primo Levi :

    "Il faut condamner ferme l'idéologie, mais ne pas accabler les hommes."

    Boualem Sansal établit un parallèle entre les camps nazis d'extermination et l'inféodation par les intégristes, que ce soit pendant la sale guerre des années 1990 en Algérie, ou (ce qui peut paraître abusif) dans les banlieues françaises. Ce lien est expliqué dans un entretien du Nouvel Observateur avec l'auteur.

    Boualem Sansal vient de publier Gouverner au nom d'Allah. Bien que menacé par les islamistes, il vit toujours en Algérie.

     

    MAÏSSA BEY

    Nom de plume de Samia Benameur, née en 1950, auteur de pièces de théâtre, poèmes, romans et essais, elle a reçu en 2005 le grand prix des libraires algériens pour l'ensemble de son œuvre.

     

    Entendez-vous dans les montagnes…

    Editions de l'Aube, 2002.

    Huis clos dans un compartiment de train, quelque part au centre de la France. Un vieil homme, Français ; une femme, Algérienne fuyant son pays à nouveau en guerre ; et Marie, petite-fille de pied-noir, jeune fille "blonde et lisse", scotchée à son baladeur. Dans un désir de mieux comprendre l'Histoire, la jeune fille fait parler ses deux voisins, et leurs souvenirs se mettent en place, étrangement imbriqués : le vieil homme, appelé en Algérie pendant la guerre d'Indépendance, a obéi aux ordres, même s'il l'a fait à contrecœur ; la femme algérienne, elle, a perdu son père à 7 ans, sous la torture des bidasses français.

    Sobrement, sans haine, dans un court récit vibrant, Maïssa Bey évoque la disparition de son père, instituteur algérien tombé sous la torture en 1957.

     

    Cette fille-là

    Editions de l'Aube, 2001.

    Recueil de plusieurs histoires courtes de femmes, qui représentent un peu toutes les femmes algériennes, et s'insurgent contre la tradition, le machisme, l'ignorance et l'anonymat dont elles sont entourées. "Cette fille-là" est une enfant née de père et de mère inconnus, qui dit sa colère :

    " J'ai tout simplement envie de dire ma rage d'être au monde, ce dégoût de moi-même qui me saisit à l'idée de ne pas savoir d'où je viens et qui je suis vraiment. De lever le voile sur les silences des femmes et de la société dans laquelle le hasard m'a jetée, sur des tabous, des principes si arriérés, si rigides parfois qu'ils n'engendrent que mensonges, fourberie, violence et malheur. "

     

    Pierre, sang, papier ou cendres

    Editions de l'Aube, 2008.

    Rédigé comme un pamphlet à l'humour grinçant contre "Madame la France", qui s'installe en Algérie, ce roman historique retraçant la colonisation de l'Algérie -du 14 juin 1830 au mois de juillet 1962- dénonce les exactions, spoliations, entreprises délibérées de déculturation, et jusqu'à la comédie de la fraternisation.

     

    Surtout ne te retourne pas

    Editions de l'Aube, 2005.

    Lire la critique.

     

    MALIKA MOKEDDEM

    Malika Mokeddem est née en 1949 en Algérie. Fille d'une famille de nomades sédentarisée en bordure de désert, de tradition orale, elle a grandi bercée par les histoires contées par sa grand-mère et a été la seule fille de sa famille et de la ville à finir ses études secondaires. Elle a suivi des études de médecine à Oran et Paris.

     

     

    La nuit de la lézarde

    Grasset, 1998.

    Nour et Sassi sont les derniers habitants d'un ksar du désert algérien, un ancien village fortifié qui donne d'un côté sur le désert, de l'autre sur la plaine. Tous les autres l'ont déserté parce qu'il tombe en ruine, que la source ne suffisait plus à tous… et surtout que la peur rôde. Des nouvelles de mort et de violences parviennent par la radio.

    Nour et Sassi vivent chacun dans sa maison, cultivent amoureusement un potager à l'abri des murs du ksar, descendent au village matin et soir pour vendre une poignée de légumes ou de bouquets d'herbes aromatiques et bavarder un moment avec leurs amis d'antan. Tous les soirs, ils se retrouvent face au désert pour admirer le coucher du soleil… ou plutôt, Nour (dont le prénom signifie lumière) décrit à Sassi, aveugle, les beautés des lumières rasantes sur les dunes.

    Leur dialogue est fait d'amitié profonde, de provocation et de chamailleries parfois, et de nostalgie du temps où le ksar vivait des bruits de tous ses habitants. Si Nour est restée au ksar, c'est surtout parce qu'elle y a gagné sa liberté, car il n'est pas facile d'être une femme indépendante en Algérie. Jour après jour, elle scrute avec impatience et anxiété l'immensité du désert, d'où reviendra peut-être, si les violences du monde l'ont épargné, l'homme aimé.

     

    Les hommes qui marchent

    Grasset, 1997.

    Les hommes qui marchent, ce sont les Touaregs.  Malika Mokeddem est issue d'une de ces familles en errance éternelle, et conte -au travers de la vieille Zohra- les temps anciens des caravanes, les traditions nomades, et la lente sédentarisation. Sa petite-fille Leïla, l'une des premières jeunes filles de la tribu à maîtriser l'écriture, est aussi la plus rebelle à la condition de recluse qu'on veut lui réserver. Elle puise dans ses racines nomades la force de s'opposer à son destin, au poids des coutumes d'un autre âge.

    A travers ce roman, largement autobiographique, se dessinent la place des femmes algériennes, et l'histoire récente d'une jeune nation, entre guerre d'indépendance et intégrisme d'aujourd'hui. Entremêlant contes anciens et récits plus récents, il est cependant un peu difficile à suivre.

     

    ASSIA DJEBAR

    Née Fatima-Zohra Imalayène à l'ouest d'Alger en 1936, Assia Djebar a étudié en Algérie et en France. C'est une écrivaine algérienne d'expression française, auteur d'une œuvre importante (romans, nouvelles, poésies, théâtre, films et essais), qui a pour thèmes récurrents l'émancipation des femmes, et l'histoire de l'Algérie. Elle siège à l'Académie française depuis 2006.

     

    Le blanc de l'Algérie

    Albin Michel, 1995.

    Assia Djebar convoque une procession de morts, hommes de culture et écrivains algériens disparus, souvent assassinés. Elle raconte ainsi l'Algérie par ses intellectuels, de sa "première procession" : Albert Camus, Frantz Fanon, Mouloud Feraoun… à Jean Amrouche, Jean Sénac, Mouloud Mammeri, Kateb Yacine, Tahar Djaout… sans oublier une procession de femmes.

      

    MOULOUD FERAOUN

    Kabyle, né en 1913, a œuvré  pour les centres sociaux chers à Germaine Tillion, exécuté par l'OAS en 1962 avec six autres personnes.

     

    Le fils du pauvre

    Seuil, 1995

    Enfance au bled, dans un village perdu au fin fond de la Kabylie, dans une famille très pauvre. Feraoun décrit le physique et le caractère des personnages de sa famille : la grand-mère qui tient l'intendance et les cordons de la bourse, le premier garçon né après plusieurs filles, pourri-gâté,…

     

    RACHID MIMOUNI

    Né en 1945 à 30 km d'Alger dans une famille de petits paysans, enseignant et écrivain engagé, il a occupé diverses fonctions dans les domaines de la culture et des droits de l'homme. En 1992 il est condamné à mort par les intégristes musulmans, mais c'est la maladie qui l'emportera en 1995.

    Son œuvre évoque le quotidien des Algériens, la guerre d'Algérie, la dictature et la révolution.

     

    L'honneur de la tribu

    Stock, 1989

    Un vieil homme raconte l'histoire de son village depuis le début de la colonisation jusqu'à ces jours de honte de la révolution intégriste. La lecture est assez ardue, car l'auteur mélange histoire et contes.

     

    La malédiction

    Stock, 1993

    C'est la malédiction qui s'abat sur Alger soumise à l'intolérance et à l'intégrisme en 1991. Celle des frères ennemis, des femmes soumises. Les intégristes viennent de lancer une grève insurrectionnelle dans le but affiché de prendre le pouvoir, ils contrôlent le plus grand hôpital d'Alger et y instaurent un ordre qui préfigure celui qu'ils veulent imposer au pays entier. Le personnage principal, médecin, est empêché de soigner certains patients.

     

    KATEB YACINE (1929-1989)

    Kabyle, né en 1929, avocat de la cause Berbère, est un homme de lettres complet. Il a écrit aussi bien de la poésie, du théâtre et des romans (Nedjma) que des essais.

     

    Parce que c'est une femme

    Ed. des Femmes, 2004

    Composé de courtes pièces de théâtre, cet opus regroupe des portraits féminins plus anciens écrits par Kateb Yacine, qui met l'accent sur les initiatives que prennent ces femmes : La Kahina ou Dihya ; Saout Ennissa ; La Voix des femmes ; Louise Michel et la Nouvelle Calédonie.

     

    Bonus du bouillon

     

    Encore des livres :

    Douglas Hawes : Oradour, le verdict final. Un livre dur, mais extraordinaire !

    Robert Merle : L'enfant roi (Fortune de France, tome 8). Sur l'enfance de Louis XIII sous la régence de Marie de Médicis. Un régal d'écriture, comme les autres tomes de Fortune de France.

     

    Cinéma :

    Mention du film documentaire "Sur le chemin de l'école", qui présente des enfants du monde (Inde, Kenya, Maroc…) prêts à tout pour se rendre à l'école. Un film bouleversant, qui relativise nos "problèmes" scolaires français.

     

    Gastronomie :

    Merci à nos hôtes de St Laurent d'Agny pour la tarte à la rhubarbe, le gâteau chocolat-poire et l'infusion de grenade.