07/07/2019
Bouillon Africain
Lectures variées, autour d'auteurs de différents pays d'Afrique noire.
Et le ciel a oublié de pleuvoir
Mbarek BEYROUK
Musée Dapper (Littérature), 2006, 124 p., 10€
Aux confins du Sahara, trois personnes racontent tour à tour la tragédie dont elles sont les acteurs. Mahmoud, ancien esclave échappé, qui a gravi les marches de l’Etat ; Béchir, chef de village aux traditions ancestrales, qui refuse l’évolution de la société ; Lolla, femme libre qui refuse un mariage de force avec Béchir et quitte le village le soir de ses noces.
Une écriture poétique et imagée, pour dresser le constat d’une société mauritanienne entre tradition et modernité.
Mauritanien, Mbarek Ould Beyrouk est né en 1957. Après des études de droit, il se lance dans la presse, et fonde en 1988 le premier périodique indépendant de son pays. Et le ciel a oublié de pleuvoir est son premier roman.
Aux Etats-Unis d’Afrique
Abdourahmane WABERI
J.C. Lattes, 2006, 233 p., 15.20€
La Fédération des Etats-Unis d'Afrique prospère, autour de la riche capitale d’Asmara, en Erythrée, indifférente au sort des millions de réfugiés caucasiens qui se pressent à ses frontières. Maya, arrachée il y a longtemps à la misère de sa Normandie natale, repart pourtant vers l’Europe à la recherche de ses origines.
Fiction parfois difficile à suivre, renversant la situation actuelle entre Nord et Sud, ce pamphlet a le mérite de nous placer face à nos préjugés.
Né en 1965 à Djibouti, Abdourahman A. Waberi est l'auteur de plusieurs recueils de nouvelles et romans dont Le Pays sans ombre, Cahier nomade et Balbala, salués par la critique, récompensés par de nombreux prix et traduits en une huitaine de langues.
Un si beau diplôme
Scholastique MUKASONGA
Gallimard (Blanche), 185 p., 18€
Parcours autobiographique d’une femme née au Rwanda dans une famille de bergers pauvres. Encouragée par son père à suivre une éducation poussée, elle a poursuivi sa scolarité, interne dans des institutions religieuses, puis en exil, afin d’obtenir un diplôme, supposé sésame pour une vie meilleure. Une grande partie de sa famille a été assassinée pendant les massacres entre Hutus et Tutsis. Elle est confrontée à plusieurs pays étrangers, dont la France, différente de l’image qu’elle s’en faisait.
Elle vit actuellement en Normandie avec son mari, français. Son roman Notre-Dame du Nil a obtenu le prix Renaudot en 2012.
Celles qui attendent
Fatou DIOME
Flammarion, 2010, 329 p., 20.30€
Deux mères Sénégalaises, Arame et Bougna, encouragent leurs fils à partir pour l’Espagne à bord d’une pirogue pour échapper à la misère. Récit fait du point de vue de celles qui attendent des nouvelles : les mères, et les jeunes épouses des deux émigrés.
Beau roman, facile à lire et instructif.
Née au Sénégal, Fatou Diome est arrivée en France en 1994 et vit à Strasbourg. Elle est l'auteur d'un recueil de nouvelles et de plusieurs romans, dont Le Ventre de l'Atlantique (2003), qui s’intéresse au même sujet, mais du point de vue d’une jeune Sénégalaise installée en France, qui tente de faire comprendre à ses frères la réalité de l’immigration.
Avenue YAKUBU
Jowhor Ile
Christian Bourgois (Littérature étrangère), 2017, 304 p., 20€
Nigeria. A Port Harcourt en 1995, le destin d’une famille bascule lorsque Paul, le fils aîné, ne rentre pas chez lui un jour de manifestation. L’écriture présente des longueurs, alternant entre ce qui s’est passé avant la disparition, la vie des parents (qui ont connu la guerre du Biafra), et ce qui lui succède.
Jowhor Ile est né en 1980 à Obagi et a grandi à Port Harcourt au Nigeria. Encouragé par la romancière nigériane Chimamanda Ngozi Adichie, il publie ses nouvelles dans les magazines littéraires à Londres, puis enseigne aux Etats-Unis. Avenue yakubu est son premier roman.
Citoyen de seconde zone
Buchi EMECHETA
Gaïa, 1994
Parcours du Nigeria à l’Angleterre. Dans les années 1940, quand le Nigeria était une colonie anglaise, les immigrés nigérians étaient issus de couches sociales favorisées, venus étudier en Angleterre. La génération suivante d’immigrés est moins favorisée. Le roman, largement autobiographique, s’attache à la vie d’Adah, fille de paysans qui réussit à émigrer à Londres. A double titre « citoyenne de seconde zone » en tant que femme et en tant qu’étrangère, elle fait preuve d’une grande ténacité pour obtenir son autonomie et élever ses cinq enfants. Un roman qui honore la résistance des femmes.
Née au Nigéria, Florence Onyebuchi Emecheta, dite Buchi Emecheta (1944-2017) a émigré en Angleterre en 1962. Elle a été successivement bibliothécaire, travailleuse sociale, chroniqueuse et professeur dans plusieurs universités aux Etats-Unis, au Nigéria et en Angleterre.
Une Maternité rouge
LAX
Futuropolis, 2019, 144 p., 22€
Du Mali au Louvre, cette superbe bande dessinée suit la destinée d’une statue de maternité Dogon. En 1960, aux temps du Soudan Français, la statuette avait été cachée par un enfant pour la soustraire aux rafles des colonisateurs. En 2015, elle est redécouverte par un jeune chasseur de miel Malien, Alou, qui sera chargé de la protéger et de l’apporter au musée du Louvre, pour la mettre à l’abri des djihadistes. Commence alors pour Alou un dangereux périple parmi les migrants africains. En parallèle, on suit le quotidien d’un professeur du musée du Louvre, passionné d’art africain.
Liens entre les pays par l’art et la culture.
Les cigognes sont immortelles
Alain MABANKOU
Seuil (Fiction & Cie), 2018, 292 p., 19.50€
Roman autobiographique. Le jeune Michel, 14 ans, vit à Pointe Noire avec Maman Pauline et Papa Roger. Avec une écriture orale qui tient à l’enfance, l’auteur décrit les petits plaisirs et tracas de l’enfance, jusqu’au moment de l’assassinat du Président Ngouabi à Brazzaville, qui entraîne couvre-feu et arrestations, et exacerbe les oppositions entre ethnies… Lorsque l’un des frères de maman Pauline, accusé de trahison, est tué, elle veut se venger sur le chef de la Révolution du Nord. L’influence soviétique est omniprésente (le titre du roman provient d’une chanson révolutionnaire russe), et on ressent également l’ingérence de la France dans le pays. Plus largement, l’auteur évoque beaucoup des caractéristiques qui empêchent les pays d’Afrique d’avancer.
Auteur congolais, né à Pointe-Noire en 1966, Alain Mabanckou est l'auteur de plusieurs romans, dont Mémoire de porc-épic (Seuil, 2006), pour lequel il a reçu le prix Renaudot ainsi que Petit piment, Lumières de Pointe Noire, Black bazar,… Il vit à cheval entre les Etats-Unis (où il enseigne la littérature francophone) et la France.
Ainsi que trois romans, dont vous trouverez les critiques plus détaillées sur ce blog :
Chimamanda Ngozie ADICHIE
Gallimard, 2014, 24.50€
La saison des fleurs de flamme
Abubakar Adam IBRAHIM
L'Observatoire, 2018, 422 p., 22€
Lagos Lady
Leye Adenle
Métailié, 2016, 20€
15:03 Publié dans Bouillon de lecture, critiques de livres | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : roman, bande dessinée, afrique, nigéria, congo, mali, mauritanie, djibouti, sénégal
15/06/2018
Couleurs d'Afrique : atelier couture
Mercredi aux couleurs des tissus "wax", ces beaux imprimés d'inspiration africaine. Josette a réuni les enfants et leurs parents autour des machines à coudre pour réaliser des trousses et pochons colorés. Bonne ambiance assurée !
Modèles tirés du livre "Ma première machine à coudre" chez Gallimard jeunesse (collection "ne plus jamais s'ennuyer").
17:39 Publié dans Animation | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : afrique, atelier créatif
21/05/2018
Couleurs d'Afrique
Pensez à vous inscrire
15:30 Publié dans Animation | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : heure du conte, afrique, atelier créatif
17/08/2016
Les pêcheurs
Les pêcheurs
Chigozie Obioma
L’Olivier, 2016, 297 p., 21.50€
Traduit de l’anglais The Fishermen par Serge Chauvin.
"Moi, Benjamin, j’étais une phalène : cette fragile créature ailée qui se prélasse dans la lumière, mais ne tarde pas à perdre ses ailes et à tomber au sol. Je n’avais jamais vécu sans mes frères. J’avais grandi en les observant, et je me contentais de suivre leurs traces… aucune idée concrète ne prenait forme dans mon esprit sans avoir d’abord flotté dans leur tête."
1996 à 2003, au Nigéria, dans une ambiance où coexistent modernité et croyances, Ben raconte la vie de la famille Agwe au travers du manque. Dans sa famille de 6 enfants, mais surtout dernier d’une série de 4 garçons très proches, il ne réalise la beauté de leur unité que lorsqu’elle vole en éclats. L'autorité parentale semblait bien établie et le monde était en ordre jusqu'au moment où le père, sévère et exigeant pour ses enfants promis à des études supérieures, a été muté dans une ville éloignée. Le jour où -suite à une petite désobéissance qui aurait dû demeurer sans conséquence- une malédiction vient empoisonner leur esprit et semer la zizanie entre les frères...
Si le récit rappelle une tragédie par son évolution inéluctable, l'auteur utilise plutôt un mode de narration africain. Chaque court chapitre est introduit par une phrase imagée représentant les personnages :
"Ikenna était un python : un serpent sauvage devenu monstrueux prédateur. Il subissait une métamorphose…
Notre mère était une fauconnière : celle qui veillait, postée sur les collines, pour repousser tous les maux qui semblaient menacer ses enfants. Elle possédait un double de nos âmes dans les poches de la sienne…
Obembe était un limier : le chien qui exhumait les choses, les examinait, les identifiait. Il mûrissait perpétuellement de nouvelles idées, qui, en temps voulu, finissaient par éclore, pourvues d’ailes et prêtes à l’envol…
La haine est une sangsue : cette créature qui vous colle à la peau, se nourrit de vous et vide votre esprit de sa sève. Elle vous transforme, et ne vous laisse pas avant d’avoir aspiré votre dernière goutte de paix…
L’espoir était un têtard : cette créature qu’on capturait et qu’on rapportait dans une boîte de conserve, mais qui, même dans l’eau appropriée, ne tardait pas à mourir...
David et Nkem étaient des aigrettes."
Chigozie Obioma, d’ethnie Igbo, est né au Nigéria en 1986. Il a fait ses études supérieures à Chypre, et réside aujourd'hui aux Etats-Unis, où il enseigne la littérature. Les Pêcheurs, son premier roman, a connu un immense succès mondial. Il qualifie lui-même son roman de tragédie igbo et de roman d'apprentissage, centré sur le sentiment de fraternité. On peut aussi faire une lecture à double niveau et interpréter ce texte comme une parabole des méfaits de la colonisation.
Aline
09:05 Publié dans critiques de livres | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : roman étranger, afrique, nigéria
01/09/2015
La saison des mangues
La saison des mangues
Cécile HUGUENIN
Ed. Eloïse d’Ormesson, 2015
Mira, partie en Afrique pour une mission humanitaire, a disparu. Lorsqu’il faut admettre sa mort, Anita, sa maman, qui a toujours vécu pour sa fille et pour son mari François, désormais interné en hôpital psychiatrique, doit s'inventer une nouvelle vie. Et pour cela se découvrir elle-même. Qui est-elle vraiment, cette femme qui tricote des bonnets personnalisés pour les personnes en chimiothérapie, et qui déteste le blanc au point de couvrir ses œufs au plat de curcuma ?
Elle trouve des forces auprès de son amie Fatou, plein de vitalité, mais aussi beaucoup dans ses souvenirs et ses origines.Sa propre mère, Radhika, était une déracinée, "vendue" à un major anglais qui exhibait sa beauté en trophée, mais s’en était vite lassé. Elle-même, élevée partiellement en Angleterre, partiellement en Inde, avait fini par épouser un Français et appris à aimer "le gris parisien". A son tour, Mira était partie à la découverte d'un autre continent, l'Afrique, où elle se croyait intégrée...
Avec des allers-retours narratifs, l’auteur tisse une légende familiale multiraciale et ouverte, sur trois générations et trois continents, avec des personnages -féminins surtout- qui passent d'une culture à une autre. Dans cette histoire de femmes, Laurent de Laurentis s’est laissé consciemment entraîner. C’est lui qui révèle le destin de Mira, qu’il admirait immensément, et en qui il s’était trouvé une sœur…
Très beau roman facile à lire, plein d'images en couleurs, d'odeurs et de sensations. Les allers-retours narratifs ne nuisent pas à la compréhension et au plaisir de lecture. En effet, comme l'exprime l'auteur (psychologue) dans cet entretien, "émotions et sentiments se jouent de la chronologie".
Aline
11:53 Publié dans critiques de livres | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : femme, inde, afrique, roman