17/03/2013
Le Seigneur vous le rendra
P'Tit-pain nous raconte son enfance dans les bas quartiers de Marrakech, agités, hauts en couleurs et en odeurs, où la Mère envoie tous ses fils gagner leur vie dès le plus jeune âge. Tout bébé, il était déjà loué à des mendiantes pour attendrir le chaland.
"Moi, j'étais né génie dans l'art de la mendicité… ainsi, je me mis à étudier de près les êtres et les choses qui m'entouraient. Je mesurai assez vite l'importance du regard et les vertus du sourire dans les rapports humains, sésame qui allait se montrer déterminant dans mon parcours."
P'tit-pain fait de la mendicité un véritable métier, dans lequel il s'accomplit longtemps pour satisfaire la rapacité de sa mère, laquelle prolonge au-delà du raisonnable son aspect de bébé chétif en utilisant de multiples subterfuges pour retarder sa croissance :
"Difficile de garder l'aspect d'un nourrisson quand on a trois ans. La concurrence devenait rude, car on trouvait des bébés à louer pour une bouchée de pain. Afin de m'aider à rester compétitif, Mère se mit à contrôler de près mon alimentation, réduite à du lait écrémé, des infusions de verveine et de légères soupes de légumes que je prenais au biberon. Elle avait pris l'habitude d'entourer mes jambes de bandelettes qu'elle serrait si fort que mon corps se résigna à remettre sa croissance à plus tard. Ainsi ficelé, je continuais à paraître bébé."
Son frère Tachfine est chargé de l'emmener jusqu'aux lieux les plus propices à la mendicité, et "de veiller sur lui comme sur un trésor". A l'abri dans son landau, P'tit-pain observe le monde qui l'entoure, la médina, s'intéresse aux adultes qui l'entourent et trouve de la beauté dans les êtres les plus déchus.
Jusqu'à ce qu'une ouverture lui laisse entrevoir qu'une autre vie est possible et qu'il saisisse sa chance…
Conte haut en couleur, ce récit picaresque fait oublier la noirceur de son sujet en utilisant un ton qui alterne entre légèreté, humour et philosophie. C'est Hector Malo ou Dickens… dans la médina !
Né en 1959, l'auteur est peintre et écrivain. Depuis une vingtaine d'années, il vit entre la France, le Maroc et les Etats-Unis. Son roman "Les étoiles de Sidi Moumen", paru en 2010, a été porté à l'écran par Nabil Ayouch sous le titre "Les chevaux de Dieu".
Il est invité à une séance de dédicace à la librairie Murmure des Mots de Brignais le vendredi 19 avril 2013.
Le Seigneur vous le rendra
Mahi Binebine
Fayard (Roman), 2013, 199 p., 18 €
18:27 Publié dans Coups de coeur, Critiques de livres | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : maroc, mendicité, histoire de vie
11/03/2013
Quand j'étais cagibi
Amy est devenue « cagibi » un vendredi où personne ne l’écoutait : elle est allée s’enfermer dans le cagibi pour bouder, en espérant qu’on viendrait la supplier de sortir… mais ses parents ont continué leurs activités sans trop s’inquiéter de ce caprice. Alors elle a décidé d’y rester indéfiniment, s’occupant comme elle peut, se nourissant de sauce bolognaise et autres conserves. Pour une fois, elle est soutenue par sa grande sœur.
Le roman, au ton très juste, relate avec humour ses humeurs fluctuantes, son imagination, son interprétation des bruits de la famille qui parviennent jusqu’à elle. Les enfants de CM1 ont été captivés par cette histoire, pourtant dépourvue d’action (et peut-être longue d’un chapitre de trop ?). L’identification au personnage principal est facile, et la chute a beaucoup plu !
Quand j’étais cagibi
Hélène Gaudy
illustrations d’Emilie Harel
Le Rouergue, collection Zig zag
février 2013, 7€
18:19 Publié dans Livres jeunesse | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : roman, histoire de vie
29/06/2012
Hate list
Hate list
Jennifer Brown – Albin Michel, collection Wiz, 2012
Le jour de la rentrée, Valérie se dit qu’elle n’y arrivera pas, elle ne pourra pas retourner au lycée, elle ne supportera pas les regards inquisiteurs, pas après ce qui est arrivé le 2 mai dernier. Ce jour-là son petit ami Nick, qui était la seule personne avec laquelle elle se sentait vraiment bien, a ouvert le feu sur les élèves et les enseignants en visant ceux dont le nom figurait sur La liste de la haine, avant de retourner l’arme contre lui. Cette liste de noms écrite dans son carnet, servait juste d’exutoire à Valérie, elle n’a jamais voulu la mort de personne. Elle se sent coupable, bien qu’elle ait risqué sa vie en s’interposant entre Nick et l’une des victimes. Elle se sent coupable parce qu’elle n’a rien vu venir. Aurait-elle pu empêcher ce drame ?
Valérie essaye de se reconstruire au fil du roman en affrontant ses angoisses, ses souvenirs, son amour pour Nick, le regard des autres victimes, le regard de ses parents.
L’auteure a choisi de nous faire partager l’après drame, la reconstruction de la petite amie du tueur et pas le parcours meurtrier du jeune garçon. Elle nous raconte comment une jeune fille, coupable et victime à la fois, tente de vivre malgré tout après une telle horreur. Les articles d’une journaliste peu soucieuse de véracité ponctuent le récit de Valérie et nous montrent comment ils ont influencé l’opinion publique sur l’événement. Les autres victimes sont très présentes dans le récit et font part de leurs doutes ou de leurs certitudes quand à la culpabilité de Valérie, mais il y a aussi ses parents qui doutent. Heureusement pour elle, un psychiatre l’aide et la soutien au quotidien, il est le seul à croire en elle et en son innocence. Enfin pas tout à fait, contre toute attente, il y a aussi la jeune fille qu’elle a sauvée qui la soutient, la fille qu’elle détestait le plus avant le drame.
Une histoire réaliste, poignante et bouleversante qui nous évoque Columbine, mais on est très loin d’ « Elephant » de Gus Van Sant.
J’ai aimé ce roman qui parle de l’adolescence, plus que du drame lui-même où les jeunes ont parfois un mal-être, où ils peuvent être cruels entre eux, où ils se cherchent et ne savent pas encore s’ils doivent rentrer tous dans un même moule ou bien s’ils doivent affirmer leurs différences.
On ne sort pas indemne d’un tel roman, on est secoué, voire malmené, mais c’est écrit avec beaucoup de sensibilité. Ce n’est jamais morbide.
Un grand coup de cœur de Dominique
Histoires de vie - Adolescence, Mal être, Drame, Pardon. A partir de 13 ans
14:46 Publié dans Coups de coeur, Livres pour ados | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire de vie, adolescence, drame, pardon
29/06/2010
Métal Mélodie
Métal mélodie, Maryvonne RIPPERT
Milan (Macadam), février 2010, 210 p. 9.50 €
Saint Genis Laval, mars 2006. Luce est une adolescente en révolte, gothique et pleine de piercings, absolument exaspérée par sa mère. Un jour sa mère disparait pour quatre mois, sans la prévenir autrement que par lettre.
Luce commence par bien profiter de sa nouvelle liberté, sur fond de "teuf métal". Après une fête pas très maîtrisée, elle laisse s'installer à la maison Moony, une squatteuse, avec son chien et son copain dealer... Puis elle se laisse, elle, séduire par Léo le beau et sympathique voisin.
Peu à peu, elle prend conscience que sa mère lui manque. Contrariée et inquiète malgré tout, elle commence les recherches pour la retrouver, et se penche sur son passé... auquel elle ne s'était jamais intéressée, et qui se révèle surprenant. Après quelques retournements et révélations, elle part à l'aventure à Grenade, pour essayer de retrouver sa mère et de renouer avec elle.
Histoire d'amour, roman d'apprentissage et voyage initiatique. Pour grandir, Luce doit d'abord s'intéresser à sa mère et apprendre à la connaître, puis renouer avec ce a été primordial pour elles deux avant leurs conflits : la musique.
Du bon Maryvonne Rippert, à l'écriture soignée, et qui touchera particulièrement les adolescentes et les mères... Du même auteur, voir aussi trois tomes des Blue Cerises.
Sélectionné par le CRILJ ados dans la catégorie Histoire de vie. A partir de 14 ans. Aline
21:17 Publié dans Livres pour ados | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire de vie, musique