16/11/2020
L'imprudence
L’imprudence
Loo Hui Phang
Actes Sud, 2019, 139 p., 17€50
Issue du monde de la BD, l’auteure signe ici son premier roman, récompensé par le prix Senghor du premier roman francophone 2019.
Vietnamienne née au Laos, la narratrice n’avait qu’un an lorsqu’elle a quitté le pays clandestinement avec ses parents et son frère. Elle a grandi à Cherbourg, dans sa famille qui tentait de respecter les traditions vietnamiennes… et il lui a fallu quitter les siens pour affirmer son indépendance et vivre de son « job » de photographe.
Lorsque sa grand-mère Waipo meurt, elle passe quelques semaines en famille au Laos, à Savannakhet. Occasion de renouer avec son grand-père, avec qui elle se sent des affinités, mais aussi de mesurer à quel point sa vie française la différencie de la jeune femme qu’elle aurait été si sa famille était restée au Laos. C’est à son grand frère que s’adresse le récit, toujours à la deuxième personne. Ce grand frère tellement marqué par l’exil qu’il s’est refusé à réussir sa vie en France.
Consolation, exutoire, plaisir de l’instant, passion… une grande part du récit est consacrée à sa sexualité, revendiquée et vécue sans complexes, miroir de celle de son grand-père en son temps. Pour reprendre le titre de l’une de ses bandes dessinées, elle aime le regard et "l’odeur des garçons affamés".
L’écriture est ramassée et sensuelle, mais pas crue. On s’attend à ce que Loo Hui Phang reprenne et approfondisse les thèmes du désir, de la famille, et de l'exil, sur lesquels il semble qu’elle ait encore beaucoup à dire.
Lire aussi sa bande dessinée Black-out, avec Hugues Micol à l'illustration, chez Futuropolis. Biographie de Maximus Wilde, acteur charismatique métis de descendance noire, chinoise et amérindienne, cette BD s'attaque au mythe Hollywoodien, et démontent les artifices d’un monde injuste et centré sur les blancs, maillon de la propagande gouvernementale.
Aline
17:03 Publié dans Critiques de livres | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : laos, exil, famille, sexualité
05/01/2013
Le déjeuner du coroner
Le déjeuner du coroner, Colin Cotterill
Albin Michel (Carré Jaune), 2006, 19.50 €
République Populaire Démocratique du Laos, 1976. Les communistes du Phatet Lao ont pris le pouvoir. Après avoir soigné pendant des années les combattants dans la jungle et les membres du Parti, Siri Paiboun, à plus de 70 ans, espérait prendre sa retraite. Mais le Parti a décidé qu'il peut encore être utile et l'a nommé –bien malgré lui- coroner principal de la république. Le voici donc médecin légiste à Vientiane, qui apprend son métier sur le tas avec une l'équipe peu ordinaire : Dtui, jeune et robuste infirmière célibataire qui rêve d'étudier, et Geung, trisomique doté d'une excellente mémoire.
A part ses différends avec le juge local, rien de bien extraordinaire jusqu'aux deux affaires qui occupent Siri dans ce roman. On lui amène le corps de la femme d'un cadre du parti, soit-disant décédée d'une virulente attaque de parasites… mais l'insistance du mari pour récupérer le corps éveille les soupçons du coroner. Peu après, les cadavres de trois militaires Vietnamiens sont retrouvés dans un lac de retenue laotien, portant des traces de torture. Cette affaire délicate risque de relancer les hostilités entre Vietnam et Laos ! Siri, honnête et consciencieux, mène ses affaires en dépit des pressions du Parti et des menaces qui pèsent sur lui. La nuit, il est visité par des visions des morts, qui tentent de le mettre sur la voie.
Premier épisode de la série du Dr Siri, dont deux titres seulement sont traduits en français, ce policier présente un regard sur certaines croyances ancestrales et coutumes de la minorité Hmongs de la province de Khamouane, le fonctionnement de la société et les rouages du Parti. Comme pour les polars ethnographiques d'Alexandrer Mc Call Smith ou de Tony Hillerman, son intérêt réside autant dans l'étude de société que dans l'intrigue. Aline
Prix SNCF du polar en 2006.
19:10 Publié dans Critiques de livres | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : roman policier, laos